Le projet de loi de finances pour 2018,
et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale qui lui est
associé, vont accumuler des mesures les plus régressives de ces
dernières années envers les agents de la Fonction publique et de ses
fonctionnaires.
1) Une hausse de la CSG DE 1,7% pour tous les agents sans véritable compensation :
Le chef de l’État va renier l’engagement
qu’il avait pris, quand il était candidat, d’améliorer « le pouvoir
d’achat de tous les travailleurs », y compris les agents publics, par
des mesures compensant une montée en puissance de la contribution
sociale généralisée (CSG).
A priori, le gouvernement a en effet
décidé de compenser pour les fonctionnaires seulement la hausse de 1,7 %
la CSG qui va intervenir à compter du 1er janvier 2018, mais sans aller
au-delà, c’est-à-dire sans honorer la promesse d’une hausse du pouvoir
d’achat qui était mentionnée dans le programme du candidat Macron.
Il était précisé dans ce programme en page 7 : « Nous
améliorerons le pouvoir d’achat de tous les travailleurs. Sans que cela
ne revienne plus cher aux employeurs, nous réduirons les cotisations
payées par les salariés, par les indépendants et par les fonctionnaires :
près de 500 euros supplémentaires nets par an pour un salaire de 2 200
euros nets par mois ! »
Lors de sa campagne, Emmanuel Macron a
ainsi annoncé une vaste réforme visant à supprimer les cotisations
salariées maladie et chômage pour les salariés du secteur privé (3,15
points), en contrepartie d’une hausse de 1,7 point de la CSG. Mais comme
ni les fonctionnaires ni les professions indépendantes ne paient ces
cotisations maladie et chômage, Emmanuel Macron a fait comprendre que
dans leur cas, des mesures de compensation seraient prises non seulement
pour compenser le relèvement de la CSG, mais aussi pour leur faire
profiter du gain de pouvoir d’achat que les salariés du privé pourraient
en retirer.
Cependant, sur le site « gouvernement.fr
» il est simplement mentionné « Des discussions auront lieu à l’automne
2017 pour définir les modalités d’une compensation de la hausse de la
CSG pour les fonctionnaires. ». On s’orienterait simplement sur des
modalités de compensation de la hausse de la CSG (suppression éventuelle
du 1% de la contribution exceptionnelle de solidarité et versement
hypothétique d’une prime complémentaire…) mais en aucun cas la hausse de
valeur du point d’indice n’est envisagée, pire, le blocage du point est
déjà prévu pour l’année 2018 et les augmentations de 0,27 % de la
cotisation pension civile pour les fonctionnaires programmées aux 1ers
janvier 2018, 2019 et 2020 ne feront qu’amputer un peu plus leur pouvoir
d’achat.
En conclusion, en plus du fait que l’augmentation de près
de 500 € annuels ne concernera pas les fonctionnaires et les agents de
l’État, ils ne pourront que constater une baisse réelle de leur
rémunération nette à compter du 1er janvier 2018… Au passage, une
majorité des retraités de la fonction publique et du privé subiront eux
de plein fouet l’augmentation de 1,7 % de la CSG sans qu’aucune
compensation ne soit envisagée.
2) Poursuite de l’austérité pour les salaires publics
Les gouvernements successifs ont en
effet décidé pendant six années, de 2010 à 2016, un gel du point
d’indice de la fonction publique, au détriment des quelque 5,3 millions
de fonctionnaires (État, collectivités et hôpitaux).
Même si François
Hollande avait fait un geste, en mars 2016, à but purement
électoraliste, en accordant une hausse très modeste de 1,2 % du point
d’indice, cela n’était absolument pas de nature à compenser les pertes
de pouvoir d’achat subies par les fonctionnaires les six années
précédentes. À l’époque, la CGT n’avait donc pas été dupe et s’était
indignée de cette aumône.
C’est pourtant le choix de l’austérité
que confirme Emmanuel Macron, sitôt installé à l’Élysée, avec à la clef
le retour au gel du point d’indice, en vigueur depuis 2010.
Les
menaces qui pèsent sur les fonctionnaires sont même peut-être plus
lourdes que cela puisque lors de la conférence nationale des
territoires, le 17 juillet, Emmanuel Macron a aussi laissé entendre
qu’une réforme pourrait intervenir, de sorte que les règles du jeu
encadrant les rémunérations publiques pour les trois fonctions
concernées ne soient pas forcément toutes identiques. Ce qui n’est pas,
non plus, de très bon augure…
3) 120 000 fonctionnaires en moins à la fin du quinquennat
Dans le lot des réformes qui menacent la
fonction publique, il y a encore la réduction des effectifs. Pour
l’heure, on ne sait pas grand-chose de ce que mitonne le gouvernement.
On peut juste se souvenir que, candidat, Emmanuel Macron avait annoncé
qu’il continuerait à réduire les effectifs de la fonction publique, en
ne compensant que partiellement les départs à la retraite.
4) Rétablissement du jour de carence
C’est un autre projet inquiétant qui
menace les fonctionnaires : dès 2018, le jour de carence sera rétabli.
Le ministre des comptes publics, Gérald Darmanin l’a annoncé au début du
mois de juillet dernier.
Le délai de carence, c’est la période
pendant laquelle un salarié en congé maladie n’est pas indemnisé par la
Sécurité sociale. Dans le secteur privé, le délai de carence est ainsi
de trois jours.
Mais dans le public, des réformes
successives ont modifié ces dernières années les règles. Alors que lors
des années antérieures, il n’y avait aucun jour de carence, François
Fillon a choisi de rétablir un jour de carence en janvier 2012. Après
son élection, François Hollande a annoncé, lui, qu’il supprimerait ce
jour de carence. La mesure a donc été votée en 2013 et est entrée en
application le 1er janvier 2014.
C’est donc le rétablissement d’un jour de carence pour les agents publics qu’Emmanuel Macron a décidé de mettre en œuvre.
A priori, on pourrait penser que le
gouvernement ne fait que rétablir un peu d’équité entre le privé et le
public – et c’est un argument dont il ne se prive pas d’user. Mais
l’argument est pourtant fallacieux. À preuve, un rapport de 2009 réalisé
par l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé
montrait que 66 % des salariés du privé bénéficient d’une prise en
charge par leur employeur des trois jours de carence. Pour mémoire, en
mai 2015, Emmanuel Macron s’opposait d’ailleurs en ces termes au
sénateur LR Roger Karoutchi, qui proposait de revenir à la mesure
sarkozyste, en utilisant cet argument. « Si l’on examine de près la
situation des salariés du privé, on s’aperçoit que les deux tiers
d’entre eux sont couverts par des conventions collectives qui prennent
en charge les jours de carence. Donc, “en vrai”, comme disent les
enfants, la situation n’est pas aussi injuste que celle que vous
décrivez. »
En somme, là encore, Emmanuel Macron a
beaucoup dit. Et s’est ensuite beaucoup dédit. Pour finir par retenir
pour les fonctionnaires toutes les solutions qui vont ponctionner leur
pouvoir d’achat.
Car c’est cela la marque de la politique
Macron à l’égard de la fonction publique : toutes les réformes vont
dans le même sens et se cumulent. Avec à chaque fois la même philosophie
: sus aux fonctionnaires ! De la part d’un chef de l’État qui est si
proche des milieux d’affaires et qui fait les yeux doux constamment au
secteur privé, et seulement à lui, est-ce si surprenant ?