Madame la Première ministre,
Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale,
Nous nous adressons à vous
solennellement au sujet de la revalorisation des personnels enseignants,
CPE et Psy-EN discutée actuellement au ministère.
La crise de recrutement de personnels
enseignants s’enracine comme le montrent les chiffres d’inscrit·es aux
concours sur ces dernières sessions. Pour 2023, en dépit d’un
prolongement de la période d’inscription, le nombre d’inscrit·es aux
concours du second degré est en baisse de 18,5% et de 13,7% pour le
concours du premier degré par rapport à 2021, dernière session
représentative.
Par ailleurs, le nombre de ruptures
conventionnelles a été multiplié par 5 en un an, passant de 296 en 2020 à
1 600 en 2021 selon le rapport annuel de la Fonction publique. Les
démissions continuent d’augmenter. Ces données démontrent indéniablement
une perte d’attractivité du métier qui pourrait s’avérer très
problématique pour le service public d’Éducation dès la prochaine
rentrée mais aussi à moyen terme.
Les réponses du gouvernement ne sont pas
à la hauteur, et par certains aspects relèvent de la provocation. Après
être revenus sur la promesse du candidat Emmanuel Macron qui s’était
engagé à augmenter de 10 % sans contreparties toutes et tous les
enseignant·es en janvier 2023, vous prévoyez des mesures salariales
inacceptables. L’enveloppe prévue pour la partie socle est insuffisante
et ne permet pas de rattraper les pertes de 15 à 25 % de pouvoir d’achat
de ces dernières années. Dans le contexte alarmant d’inflation
installée, votre choix politique est loin de compenser un pouvoir
d’achat en berne pour tous les personnels.
L’enveloppe allouée pour la partie socle doit être augmentée en conséquence et s’inscrire dans une logique pluriannuelle claire.
Quant au pacte, nous réfutons le terme
de revalorisation pour cet instrument qui ne répond en rien aux attentes
des collègues. Loin de contribuer à la revalorisation attendue par
toutes et tous, il va conduire à un alourdissement de la charge de
travail des personnels, alors qu’une enquête de la DEPP a fait la
lumière sur la réalité du temps de travail des enseignantes et
enseignants (la moitié travaille plus de 43h par semaine) et que des
chiffres de l’observatoire du bien-être confirment les conditions de
travail difficiles pour la profession : la moitié des personnels est en
état d’épuisement avancé. Dans le contexte de négociation des nouveaux
plans d’action Égalité professionnelle dans notre ministère, où la
demande sociale est forte, le pacte porte le risque avéré d’aggraver les
inégalités femmes/hommes.
Enfin, le pacte va considérablement
dégrader le fonctionnement des écoles et des EPLE et fragiliser les
collectifs de travail par une mise en concurrence des personnels. Le
pacte se révèle être un outil qui fait primer des impératifs politiques
sur toute autre considération en étant l’appui de la mise en place de
réformes qui ne sont même pas encore concrétisées, comme au collège ou
dans la voie professionnelle. Nos organisations refusent le Pacte et
réclament dans l’immédiat le basculement de l’enveloppe du pacte dans
celle prévue pour le Socle.
Les personnels de l’Éducation nationale
sont très mobilisé·es contre le projet de réformes des retraites en
pointant notamment l’injonction à travailler plus longtemps avec des
salaires insuffisants et dans des conditions difficiles. Toutes nos
organisations syndicales ont signifié leur désaccord avec la logique du
pacte dans le cadre des discussions avec le ministère de l’Éducation
nationale, notamment en quittant la réunion du 6 mars. Nous exigeons que
le gouvernement en tire les conclusions qui s’imposent.
Madame la première ministre, Monsieur le
ministre, l’Education nationale s’enfonce dans une crise sans précédent
et vos réponses ne sont pas à la hauteur. Elles contribuent à nourrir
une forme de colère et d’amertume chez nos collègues qui va laisser des
traces profondes et durables dont vous porterez la responsabilité.
Tous les signaux montrent l’urgence
d’une revalorisation salariale pour tous les personnels de l’Éducation
nationale, dont certain·es comme les AESH vivent même sous le seuil de
pauvreté.
L’agenda social du ministère prévoit
certes des concertations pour quasi toutes les catégories de personnels,
mais il y a des incertitudes majeures sur la capacité de l’État
employeur à améliorer clairement la rémunération de certains personnels
comme les assistant·es de service social, les infirmiers·ères et les
ITRF. Les attentes des personnels sont fortes, les besoins du système
éducatif ne le sont pas moins. Notre Ecole ne peut assurer ses missions
dans de bonnes conditions en manquant toujours autant de personnels
d’enseignement et de vie scolaire, de PsyEN, de personnels
administratifs et ITRF, de personnels sociaux et de santé, d’AESH et
d’AED. Elle ne peut fonctionner correctement avec autant de personnels,
quel que soit leur métier, qui constatent le manque de reconnaissance
financière de leur travail, le manque de considération pour leur
engagement professionnel au service de la réussite des élèves.
Nous réaffirmons, ensemble, notre
revendication d’une revalorisation ambitieuse et sans contreparties pour
tous les personnels, qui doit s’appuyer sur un plan de financement
pluriannuel.
Madame la première ministre, monsieur le
ministre de l’Éducation Nationale, nous vous demandons de vous saisir
de ces enjeux importants qui conditionnent l’avenir de notre Pays au
travers des personnels de l’éducation et de prendre les mesures à la
hauteur.
Nous vous prions de croire, Madame la première ministre, Monsieur le ministre, en l’expression de nos salutations respectueuses.